2 rendez-vous prévus
– Mardi 17 janvier à 19h à la Médiathèque L’échappée / Rillieux-la-Pape
– Mercredi 18 janvier à 19h à l’Escale, Espace Culturel de Saint-Genis-les-Ollières
Découvrez le Booktube sur Carole Fives avec Gabriel, bibliothécaire à Pierre-Bénite, réalisé par Thomas Iglésis pour les BM de Lyon et la Métropole de Lyon
Auteure de recueils de nouvelles, de livres pour la jeunesse et de romans publiés pour la plupart aux éditions Gallimard, Carole Fives est une écrivaine qui aborde dans de nombreux textes le rapport à l’art et à la création littéraire en se jouant des frontières ténues entre la matière autobiographique et l’invention romanesque. Dans Térébenthine, son précédent livre, elle mettait en scène trois étudiants inscrits aux Beaux-Arts qui s’interrogeaient sur la place de la peinture dans l’art contemporain, et notamment une jeune femme pour qui toute ressemblance avec l’autrice n’était pas forcément fortuite, puisqu’il était question du passage de celle-ci à l’écriture après des études artistiques. Quand on sait que Carole Fives est diplômée des Beaux-Arts, on imagine que cela n’était pas une simple coïncidence… Mais l’autre force de Carole Fives est d’incarner dans des personnages très attachants des problématiques intimes en lien avec les grands enjeux de nos sociétés actuelles. Ainsi, Tenir jusqu’à l’aube mettait en scène une jeune mère seule qui, le soir venu, fuyait dans les rues de sa ville en laissant son enfant sans surveillance. Une manière radicale d’interroger la réalité des familles monoparentales dans la solitude des grandes villes, tout en offrant une belle réflexion sur la parentalité et la charge mentale des femmes d’aujourd’hui face à toutes les injonctions du présent – notamment celle d’être une « bonne mère ». Des livres sans concession, qui appuient là où ça fait mal.
La narratrice de ce nouveau livre est une écrivaine au succès modeste et à l’inspiration en berne, fervente admiratrice d’une autrice récemment disparue du nom de Béatrice Blandy. Un jour, elle rencontre son veuf, Thomas Blandy, avec qui elle va entamer une relation singulière lui permettant de côtoyer de très près l’univers de son idole disparue : son appartement, sa bibliothèque, sa chambre, et bien sûr son bureau… Impossible d’en dire plus sans dévoiler tout ce qui fait le sel de ce roman à double (triple ?) fond, qui interroge avec beaucoup de force le rapport à l’admiration – voire à l’imitation – mais aussi l’énigmatique enjeu de la création littéraire, de l’inspiration, des références qui guident un auteur vers l’écriture. Un livre bourré de clins d’œil cinématographiques qui dit aussi les vertiges de la honte sociale et du sentiment d’imposture, tout en explorant les coulisses de la vie littéraire et la mystérieuse alchimie qui permet de transformer la réalité en fiction – et vice versa. Un livre à clefs et à rebondissements, entre thriller psychologique et méditation sur la littérature qui, pour reprendre un titre de Carole Fives, vous fera forcément tenir jusqu’à l’aube.
Le nouveau roman de Carole Fives pourrait se situer quelque part entre Rebecca, de Daphné du Maurier, Vertigo d’Alfred Hitchcock et D’après une histoire vraie, de Delphine de Vigan. L’auteure ne fait pas mystère des deux premières références, puisque le film du maître anglais du suspense est fréquemment évoqué, et qu’il est la clé de voûte d’un retournement final particulièrement inattendu. Quant à Rebecca, il en est aussi question dans Quelque chose à te dire, qui pourrait en constituer une sorte d’adaptation moderne, tant certaines situations semblent avoir été écrites en écho au roman de Daphné du Maurier, notamment la référence au mausolée Manderley et à la glaciale gouvernante, madame Danvers, qui semble trouver son double en la personne de Paola. Dernier rapprochement possible, celui que l’on peut faire entre le roman de Carole Fives et celui de Delphine de Vigan, D’après une histoire vraie, non seulement dans l’expérience de fictionnalisation du réel, mais aussi par le registre littéraire dans lequel il s’inscrit, puisque cette histoire entre une narratrice / écrivaine et celle qui phagocyte son art (la mystérieuse L.) alliait également une dimension de thriller à une réflexion intense sur le motif du double dans l’art romanesque. Un roman qui était par ailleurs hanté par un autre livre – Misery, de Stephen King – offrant là aussi un jeu de piste fascinant sur la création littéraire et les affres de la manipulation. Quand on vous dit que la littérature est affaire de mise en abyme !
Retrouvez le portrait de Carole Fives par Yann Nicol ici
Et pour aller plus loin sur le Prix Summer, rendez-vous ici.